Nous vous en parlions récemment et il est enfin entre nos mains ! Disponible depuis le 12 juin 2025, « Les Conspirations de Deus Ex : Cyberanatomie d’un jeu culte » rejoint le catalogue exigeant de THIRD éditions ! Avec une ambition claire : analyser en profondeur l’œuvre fondatrice de Ion Storm et Warren Spector, Deus Ex (2000).
Avis donné via grâce à un exemplaire envoyé par l’éditeur que nous remercions !
L’objet-livre : deux visages pour une approche du complot.
Décliné en trois éditions comme très souvent chez THIRD éditions, l’ouvrage qui nous intéresse aujourd’hui est encore disponible alors profitez en !
- Édition simple : 29,90€
- Édition First Print : 34,90€
- Édition numérique : 11,90€
L’édition First Print se distingue par une couverture exclusive illustrée par France Mansiaux. Froide, clinique dans ses lignes, elle fait directement écho au sous-titre de le l’ouvrage : Cyberanatomie d’un jeu culte.


L’édition simple, quant à elle, arbore une couverture plus sombre, bleutée, ancrée dans l’esthétique conspirationniste et dystopique du jeu original. Elle évoque les thèmes clés de Deus Ex : surveillance, augmentation, manipulation globale.


Deus Ex à son début.
Sorti en 2000, le premier Deus Ex prend place en 2052, dans un monde en pleine déliquescence. Une pandémie baptisée “la Peste Grise” décime la population mondiale. Et le remède, un vaccin appelé Ambroisie, est rationné par des élites corrompues. Les États ont perdu leur souveraineté au profit de mégacorporations, d’organisations paramilitaires et de sociétés secrètes aux ambitions troubles.
Le joueur incarne JC Denton, un agent nano-augmenté de l’UNATCO (une agence antiterroriste internationale). Formé pour traquer des groupes jugés extrémistes. Mais très vite, les lignes de la vérité se brouillent. Ce que l’on présente comme des terroristes cache souvent des résistants. Et ceux qui tirent les ficelles derrière les gouvernements ne sont pas toujours humains…
L’univers est profondément inspiré par le cyberpunk, les théories du complot (Illuminati, MJ-12), et des questions philosophiques sur le libre arbitre, la technologie et l’humanité. Dense, cynique, intelligent, Deus Ex propose un monde où chaque couloir recèle une surveillance. Chaque ruelle une vérité dissimulée, et chaque choix une conséquence à long terme. Alors comment ne pas avoir envie de s’y plonger d’avantage avec LES CONSPIRATIONS DE DEUS EX : Cyberanatomie d’un jeu culte de Anaer ?

« Ce livre ne s’intéressera cependant pour l’essentiel qu’au Deus Ex d’origine, le tout premier. Pourquoi ? Conçus une décennie plus tard par des développeurs différents, les reboots sont de très bons jeux, qui méritent d’être appréciés à leur propre titre, mais ils n’ont pas la richesse visionnaire de l’original. Je suis convaincu que celui-ci se suffit à lui-même en tant qu’objet d’analyse, et que son originalité comme sa profondeur justifient qu’il reste l’exclusif sujet de notre attention. » — Extrait du livre
Un ouvrage aussi ouvert que l’œuvre qui l’a inspiré.
Un sommaire qui parle le langage de Deus Ex?
Loin d’être une experte de la saga, le sommaire m’a pourtant interpelé. C’est épuré et lisible bien sûr mais le découpage n’a pas ce côté académique classique. Les titres des chapitres sont numérotés façon code informatique (00::IDEA, 01::OPERA, etc.), ce qui évoque immédiatement l’esthétique cybernétique et systémique de Deus Ex. Cette typographie et ces préfixes (::) font très « console de commande », comme si l’on plongeait dans le cœur d’une IA ou d’un système sécurisé, tout à fait dans le ton du jeu.
( 04::MACHINA ! Difficile de faire plus Deus Ex que ça ! Il y a là une référence directe à “Deus Ex Machina”, mais aussi aux augmentations, implants, à la place de la machine dans l’humain.)

Warren Spector, ou comment un historien cinéphile a hacké le jeu vidéo.
Et si je vous dis : Warren Spector ? Est ce que vous répondriez « l’artisan d’un jeu impossible » ?
Avant de me plonger dans Les Conspirations de Deus Ex, je ne savais pas grand-chose de Warren Spector. Un nom aperçu dans quelques making-of, une figure un peu floue derrière des titres cultes, un gourou du jeu à choix multiples. Et puis voilà que le livre m’apprend que ce monsieur n’était ni codeur, ni graphiste, ni développeur au sens technique, mais bien un universitaire passionné d’histoire et de cinéma. Oui, cinéma. Le genre de profil qu’on n’associe pas d’office à un FPS cyberpunk complotiste.
Et pourtant. Ce qui fait la force de Deus Ex, ce n’est pas juste son gameplay ouvert ou son univers parano, c’est cette volonté farouche de créer un jeu où l’on peut vraiment jouer à sa façon. Et ça, c’est du Spector tout craché. Débarqué chez Origin Systems à la fin des années 80, il apprend son métier aux côtés des plus grands (Looking Glass, Richard Garriott…) et produit des ovnis comme Ultima Underworld, System Shock ou Crusader: No Remorse. Autant dire qu’il était déjà en train de préparer l’explosion des jeux immersifs avant que le terme soit à la mode.
Ce n’est qu’en 1997, chez Ion Storm Austin, qu’il prend les commandes de Deus Ex, son jeu rêvé. L’équipe est jeune, les moyens limités, l’ambition démesurée. Et pourtant, il parvient à accoucher d’un titre où toutes ses obsessions se croisent : le joueur au centre de l’expérience, des choix moraux, des systèmes qui se répondent, et un univers post-11 septembre avant l’heure. Résultat : Deus Ex n’est pas juste un bon jeu, c’est une œuvre fondatrice. Une vision.
Et comme le rappelle le livre, derrière le mythe, Spector est resté fidèle à sa ligne de conduite : faire des jeux où le gameplay est une conversation entre le joueur et le monde. Aujourd’hui, il continue d’enseigner, de conseiller, et de rêver de jeux où l’on n’est pas simplement le héros, mais l’auteur discret d’un désordre parfaitement orchestré.

Un jeu prophétique ? Quand Deus Ex reflète (trop bien) le monde réel.
Ce que Les Conspirations de Deus Ex rappelle avec une acuité presque glaçante, c’est à quel point le jeu de Warren Spector, sorti en 2000, semblait déjà avoir tout compris à notre monde post-11 septembre… un an avant qu’il n’existe. Dans Deus Ex, le joueur navigue dans un univers saturé de surveillance, de multinationales toutes-puissantes, de gouvernements aux ordres, de pandémie mystérieuse et de manipulation médiatique. À l’époque, on parlait de cyberpunk ; aujourd’hui, on parle des infos de 20h. Le parallèle est saisissant.
Le plus troublant, c’est que rien n’y est caricatural. Le jeu ne donne jamais de leçon, il invite à se poser des questions. Sur le libre arbitre, sur la vérité, sur l’illusion de sécurité et sur le prix du progrès. Le monde de Deus Ex n’est pas une dystopie future, c’est une relecture paranoïaque — et pourtant lucide — de notre propre société. Ce n’est pas de la science-fiction : c’est un miroir noir tendu vers notre modernité. Et avec le recul, c’est presque effrayant de constater à quel point les thématiques du jeu sont toujours d’actualité — peut-être même plus aujourd’hui qu’en l’an 2000.
Alors non, Deus Ex n’a pas prédit le futur. Mais il a su capter une onde souterraine, une inquiétude diffuse, une tension mondiale prête à éclater. Et c’est peut-être ça, le vrai génie de Warren Spector et de son équipe : avoir conçu un jeu visionnaire sans boule de cristal, simplement en observant attentivement le monde autour d’eux.
« Dès que quelqu’un en reparle, quelqu’un d’autre le réinstalle. »
Chez THIRD editions, on ne se contente pas de parler de jeux vidéo. On les décortique, les éclaire, les raconte comme des œuvres complètes, riches de sens, de contextes et de visions d’auteur. Les Conspirations de Deus Ex ne fait pas exception. Bien au contraire. Il m’a permis de m’immerger pleinement dans un univers que je n’avais jusqu’alors fait qu’effleurer, comme on survole un classique sans jamais oser s’y plonger vraiment.
Parce que Deus Ex, pour moi, c’était surtout un nom. Une aura de légende, une réputation d’ovni intelligent, un jeu qu’on cite toujours dans les « incontournables » sans que je l’aie réellement exploré. Et voilà que ce livre m’a pris par la main, sans condescendance, pour me guider dans ce labyrinthe de conspirations, de philosophie cyberpunk, de questions morales et de choix systémiques. Il ne m’a pas seulement appris des choses sur le jeu ; il m’a ouvert les yeux sur tout un pan de la culture vidéoludique que je ne soupçonnais pas si dense, si actuel, si pertinent encore aujourd’hui.
Ce que j’apprécie particulièrement, c’est le soin avec lequel l’auteur structure son propos, la manière dont chaque chapitre semble correspondre à une couche de sens du jeu : ses origines, son gameplay, son récit, son discours idéologique… Jusqu’à son impact plus large sur le média. Il y a une vraie réflexion derrière chaque partie, un effort d’écriture autant que de transmission. Et surtout, on ne sent jamais la distance froide du critique ou du spécialiste enfermé dans sa tour d’ivoire. On sent au contraire un vrai respect, une admiration lucide, parfois critique, mais toujours honnête, pour l’œuvre et ses artisans.
En refermant Les Conspirations de Deus Ex, j’ai non seulement mieux compris pourquoi ce jeu est culte, mais surtout j’ai eu envie d’y jouer. Pas juste pour « cocher une case » de mon backlog. Mais pour m’y perdre, y réfléchir, y expérimenter. Et si un livre peut provoquer ça, alors c’est qu’il a réussi bien au-delà de l’analyse non ?
